Sylvain Amic est parti brutalement, aux confins du mois d'août. C'est un grand malheur de perdre ainsi un collègue conservateur de musée, un compagnon de route et un modèle, de perdre surtout un ami. Je souhaite simplement en parler. Il était depuis avril 2024 le président d’un vaisseau magnifiqu, le musée d'Orsay, y avait plein de projets (plus d'un par jour): ouverture aux musées de province, médiation et jeunes publics, sensibilisation aux thèmes du climat, expositions originales. Dernièrement par son intervention, le musée Soulages a obtenu en prêt pour Agnès Varda le Brick au clair de lune de Gustave Le Gray: cette marine photographiée, à Sète en 1856 était une œuvre admirée par Pierre Soulages.
J'ai connu Sylvain il y a environ vingt ans, conservateur chargé des collections du XIX et XX émes siècles au musée Fabre de Montpellier pour lequel il abattit un travail considérable ; accrochage inaugural, expositions. En 2008, il assurait le commissariat de la rétrospective Emil Nolde pour le Grand Palais, ensuite pour Fabre : au musée des Sables d'Olonne nous faisions en été 2008 les Ungemalte Bilder (Images non peintes) de ce peintre: ça nous a rapproché, notamment les séances d'archives à la Fondation Nolde, dans les marais verdoyants du Schleswsig-Holstein, les discussions à Paris, En août 2008, le tout premier, il m'encourageait à m’intéresser à Pierre Soulages et son musée en devenir... J'y allais.
En 2010, le musée Fabre organisait avec le musée Soulages en préfiguration une exposition sur les vitraux de Conques, avec Sylvain à la manœuvre. Le couple Soulages, Pierre Encrevé et Sylvain Amic, une amitié proactive. Sylvain a accroché les salles Soulages à Montpellier en 2009. Son expérience avec le régisseur Pierre Susini nous a engagé à le faire travailler avec Dan McEnroe , assistant du peintre, pour l’accrochage de ses œuvres à Rodez : avril et mai 2014. Le couple Soulages, le contenu des collections de Fabre, nous réunissait : proximité, rencontres, évaluations, conférences, collaborations.
Sylvain Amic partit à Rouen pour diriger les musées de la Métropole : on lui doit de remarquables expositions sur les impressionnistes, des expositions : je retiens celle, somptueuse et culottée, Salammbô, union entre littérature, et arts. C'était tout son portrait. Historien d'art et directeur il était de la famille des missi dominici: jouer avec les périodes, délocaliser les événements, rassembler les énergies, convaincre le péquin.
Puis, il partit à Paris auprès de la ministre de la culture Rima Abdul-Malak: combien de fois il épaula le musée Soulages-EPCC en haut lieu ? Il le connaissait très bien et fut d’un secours précieux pour conserver au musée sa singularité et cultiver les projets. On pouvait compter sur Sylvain Amic : jamais un appel auquel il ne répondît pas.
Comme ses amis je me suis réjoui de sa nomination à Orsay. Enfin. Il en rêvait depuis des années. Ce grand professionnel aux incessantes curiosités le méritait, si éloigné de l’entre-soi des pontes de musées, hors du moule stérilisant de l’Administration sui generis. Atypique est le mot qui qualifie ce conservateur qui fut instituteur, accessible, généreux et cultivé. Les visites guidées de ses propres expositions étaient des équipées, pour tous les publics.
Voilà brièvement, pour le collègue qui était fidèle, entreprenant et organisateur, souriant et sachant rire. Gardant l'ami dans mon cœur et adressant à son épouse, à leur fils, à ses proches et son équipe d'Orsay mes pensées les plus sincères.
Le 1er septembre 2025